Damnatio Memoriae

John est né de l’union de deux familles.

Du côté maternel, nous avons la famille Onfroy, issue d’une lignée viking. Cette famille possède aujourd’hui une réputation de former des hommes capables d’utiliser les épées des deux mains. Cette ambidextrie est le fruit d’une éducation visant à manier deux armes blanches à une main, un style particulier qui survécut au cours des décennies, mais, qui se confronta à de nombreux obstacles. Tout d’abord, ce style n’était compatible qu’avec des combats solitaires, étant trop dangereux pour les alliés en combat rangé. Ensuite, les armes utilisées évoluant avec leurs époques, la maîtrise ne pouvait être que moyenne. Enfin, l’avènement des armes à feu mit à mal ce style uniquement porté au corps-à-corps.
Si les hommes apprenaient ce style par leurs aînés, la première femme mariée emportait avec elle un livre où était consignée l’expérience des générations précédentes, en faisant un ouvrage précieux et régulièrement restauré, afin de persister dans le temps. Cette famille est connue pour avoir fait de nombreux dons par le passé.

Du côté paternel, nous avons une famille plus récente, mais ayant pu s’élever par des alliances profitables, accédant au rang de vicomte.  La famille Holmes n’est pas spécialement connue pour de haut-faits militaire ou avoir des boutiques très florissantes. Cependant, les soirées qu’elle organise démontrent une certaine richesse, gardant bien secret la source des produits exotiques et multipliant les gestes pour s’attirer les bonnes grâces des familles plus hautes dans la noblesse. Des rumeurs circulent sur le fait que cette famille utiliserait des méthodes peu respectables pour agrémenter ses soirées. C’est une famille réputée orgueilleuse, n'ayant guère d'autres défauts connus.

La raison de ce mariage n’était guère pour permettre à la famille du côté maternel de monter de rang, non. Le but était que la famille Holmes s’accapare la réputation de celle d’Onfroy, afin d’effacer les rumeurs qui circulent à son encontre et aussi pouvoir briller sur le plan militaire, espérant attirer des propositions de mariages intéressantes.

John est le dernier de la fratrie, ayant deux grands frères, le condamnant à une vie compliquée, si deux de ses frères ne venaient pas à mourir. Il reçut une éducation tout à fait banale, assimilant très rapidement les bases enseignées par la gouvernante. Cette dernière fut assez surprise d’avoir affaire à un enfant qui était calme et patient.

Le reste de son enseignement se fit à la maison, recevant la même éducation que ses aînés, dans le cas improbable qu’ils viennent à mourir avant d’avoir pu nouer des liens avec une autre famille. La capacité d’assimiler rapidement fut très mal vue par ses grands frères, y voyant une nuisance potentielle et n’hésitant pas une seule seconde à lui rappeler qu’il n’était que le troisième fils de la famille Holmes.
Alors qu’il avait dix ans, il assista à un écart de conduite de l’aîné, voyant ce dernier lever une canne vers la gouvernante, ayant visiblement commis un impaire. Pour John voir cette femme sur le point de subir une telle sanction lui était insupportable, venant s’interposer et recevant le coup sur son épaule gauche. Cet incident déboucha sur une confrontation avec son père et s’il fut reconnu que l’aîné avait manqué de sang-froid, il fut explicitement dit à John de ne plus agir de la sorte. La gouvernante reçut quant à elle une pénalité financière, ce qui était certainement déjà une bonne chose comparé à un possible renvoi.

Cette expérience ouvrit les yeux de John entre sa vision de ce que doit être un noble et ce qu’il en était réellement au vu de sa famille. Il se rendit aussi compte d’une chose, il ne semblait jamais satisfait de sa personne, ressentant comme un manque qu’il ne pouvait définir. Il vint donc renforcer sa bienveillance envers les domestiques, comme pour compenser le manque de considération du reste de la famille. Cela creusa un fossé au sein de la famille, étant vu comme un raté, cette dernière ne voyant pas qu’il arrivait à obtenir la fidélité et l’obéissance, sans avoir à utiliser les contraintes.
Il tenta à de nombreuses reprise d'exprimer son opinion sur la gestion des serviteurs, sur ce qu'il y avait à gagner en se montrant moins stricte. Chaque fois il fut traité d'enfant qui ne savait rien et qu'il n'avait pas son mot à dire sur ce sujet.

Le temps se mit à s’écouler, la fracture avec la famille était discernable sans invité et dans le cadre privé. Quand il y avait des invités ou en public John serrait des dents pour paraître uni avec sa famille, même quand certains sujets lui faisaient dresser ses cheveux.

Il découvrit le livre hérité de la famille Onfroy, dévorant son contenu et venant à essayer quelques postures en cachette, se doutant que s’il traînait à la bibliothèque, malgré son savoir, c’est que la famille Holmes n’y apportait aucune valeur. Il comprit rapidement que ce genre de livre ne pouvait qu’initier à la discipline du combat et surtout entraîner les deux mains.

Alors qu’il avait fêté ses seize ans, il fut invité par son aîné dans une soirée, cette initiative n’étant pas du goût de son père, informé trop tardivement. Le but n’était clairement pas bienveillant, voulant ridiculiser le benjamin en public, lui montrer ce qu’il ne pourra, selon lui, jamais obtenir. Cela ne se passa pas comme l’aîné avait prévu. Si John n’avait guère d’expérience pratique, il exploita au maximum les connaissances théoriques instruites, ainsi que celles récoltées par les domestiques, davantage habitués à ce genre d’événements. Si John ne fut pas présenté aux convives, certains furent intéressés par les traits particuliers du jeune homme, il n’eut clairement pas l’opportunité de faire quoi que ce soit, son aîné se rendant compte que la situation lui échappait et devait faire bonne figure, tout en éloignant au plus vite John.
Son père ne vint pas féliciter John devant sa performance, toujours aussi indifférent à celui-ci, mais sermonna en privé l’aîné devant son action malavisée. Devant cette erreur monumentale, que le vicomte eut grand mal à corriger, il vint à donner à John une petite somme, sous-entendant par ce geste qu’il devait partir au plus vite, afin de ne plus causer de soucis.

Il partit, non sans demander le livre familial d’Onfroy, demande qui fut accepté pour qu’il puisse s’éloigner de la demeure des Holmes. John vint à utiliser la somme reçue pour racheter la boutique d’un notaire en fin de vie, permettant de récupérer une partie de la clientèle de ce dernier.

Cela fait quelques jours que John est soumis à des visions étrange, dans ses rêves, une femme à tête de lionne, ne dégageant aucune hostilité et rappelant la douceur de la gouvernante qui avait pris de soin de lui petit. Il éprouve aussi la sensation qu'une voix lui murmure au creux de l'oreille, ainsi qu'une envie d'aller à des endroits précis, alors qu'il n'a guère de motif personnel d'y aller.
S'il s'est tenu éloigné des indices laissé par la déesse, John devient de plus en plus curieux et l'appel d'explorer un endroit inhabituel ne rend que la suggestion plus efficace.